Quand on évoque la mode « éthique », on parle beaucoup d’environnement, pourtant ce doux mot implique beaucoup d’autres aspects. L’éthique renvoie aussi à des notions morales telles que le partage et la solidarité. Pour mon 7e portrait de créateur engagé j’ai donc voulu vous présenter une marque qui a mis l’humain au centre de sa démarche : Umòja.

Umòja signifie « unité » en swahili. C’est une jolie marque de sneakers mettant en avant des savoir-faire africains. Je l’ai découverte lors de ce fameux créathon chez Makesense dont je vous parlais ici.

2 choses m’ont frappées lors de la présentation d’Umòja :

  • le mélange atypique entre un objet d’origine très occidentale : la fameuse basket, et des matières naturelles aux motifs traditionnels africains.
  • Le discours de Lancine, qui malgré un petit peu de trac (il faut dire qu’on était nombreux…), évoquait sa volonté de soutenir des artisans.

Métissage culturel et savoir-faire artisanal : de quoi me donner envie d’en savoir plus. Quelques mois plus tard j’ai donc recontacté Lancine, pour qu’il me raconte son histoire !

Des produits et des Hommes

« On développe des collections, mais Umòja c’est bien plus qu’une paire de chaussures. C’est une aventure humaine. » 

Comme Lancine le dit si bien, derrière chaque objets qui nous entourent se cachent des gens : des idées, des savoir-faire, des salaires, des choix… C’est quelque chose qu’on oublie trop souvent et qui est valable pour tout : de l’application que vous utilisez chaque jour sur votre mobile au T-shirt que vous avez décidé de porter ce matin ! En tant que consommateur nous sommes simplement le dernier maillon de toute une chaine de personnes qui ont donnés vie à une idée en créant un produit.

« Mon associé et moi avons beaucoup voyagé en Afrique. On y a rencontré des artisans qui avaient des savoir-faire très beaux et très respectueux de l’environnement. Mais on s’est aussi rendu compte que peu de choses  étaient réellement misent en place pour les aider alors qu’en parallèle il y avait beaucoup de textiles très polluants sur les marchés. 

On a donc décidé de traverser l’Afrique d’Est en Ouest à la recherche d’artisans ; pour voir ce qu’on pouvait faire pour les soutenir, et comprendre leurs besoins. On a noué des dialogues, tissé des liens. On leur a demandé s’ils étaient partant pour qu’on vendent leurs produits et les faire grandir avec nous. »


Artisanat et matières écologiques

Les savoirs-faire montrés par Umòja reflètent un véritable patrimoine culturel. La marque reprend des techniques anciennes très traditionnelles, mais à l’heure où l’industrie de la mode se penchent (enfin) sur son impact écologique et social elles apportent un vent de fraîcheur et d’innovation sur le marché de la mode éthique.

« Pour l’instant on travaille avec 5 pays, chaque partenaire à son savoir-faire. Le bogolan au Mali qui est une technique de peinture à base de jus d’écorce et d’argile. La maîtrise du raphia avec la Côte d’Ivoire. Le Lubbugo qui repose sur le travail de l’écorce ou encore le tissage de la fibre de Bananier avec l’Ouganda. On travaille également avec des coopératives de tisserands de Manjak au Sénégal et de Faso Danfani au Burkina Faso. »  

Chaque tissus a son histoire. Toutes les matières ont été « sourcées » sur place, lors d’un long travail de recherches fait de rencontres et d’échanges entre les fondateurs d’ Umòja et ces artisans. Tout juste commercialisées après prés de 2 ans, les sneakers commencent à faire parler d’elles. 

« Actuellement on fait pas mal de salon pour avoir de la visibilité. La Foire de Paris a beaucoup fait parler de la marque. On a de très bons retours. L’idée du projet plaît, on reçoit beaucoup de messages d’encouragements ! 

C’est important pour nous de faire bouger les choses. On est fier de montrer le travail de ces artisans. Et heureux de voir que ça peut leur amener aussi d’autres partenaires et les aider à se développer. Cela reste leurs Arts ! On fait notre possible pour les valoriser.»


La création d’une filière

Souvent lorsque je demande à une marque ce qu’elle envisage pour la suite, on évoque de nouvelles collections ou de nouveaux types de produits. Mais lorsque j’ai posé cette question à Lancine, la réponse était toute autre, et il m’a semblé qu’elle illustrait assez bien l’ambition humaine d’ Umòja.

« Les coopératives avec lesquelles on travaille ont un impact très positif au sein de leur communauté. On voudrait créer des partenariats qui nous permettent de les soutenir et d’offrir à ces artisans des outils plus modernes pour qu’ils travaillent dans de bonnes conditions. On envisage de créer en quelque sorte notre propre filière en s’associant avec un réseau d’artisans sur tous les maillons de la chaîne : des champs de coton à l’atelier de fabrication. En gardant tout au long de la chaîne cette notion de solidarité qui est au coeur de notre projet. »

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Merci beaucoup Lancine d’avoir pris le temps de répondre à mes questions et pour nous rappeler que derrière une simple paire de chaussures peut se cacher beaucoup d’autres valeurs.